Le Grand Genève, fiction, rêve ou réalité ?

 

Réalité géographique

Prenez "Google map" et visualisez la région. C'est très simple. Les montagnes, les rivières, le lac, sont des frontières naturelles qui définissent un territoire autrement plus concret que les divisions de l'Histoire.

Le Grand Genève n'est déjà plus une question, c'est une réalité géographique, historique, économique, sociale. Bref, le temps est venu de revisiter nos réticences et de mettre en place des synergies, des collaborations, puisque la frontière politique est aussi une réalité incontournable.

Bientôt, très bientôt à l'échelle de l'histoire de l'humanité, il n'y aura plus qu'une ville de Genève à Nyon ou Lausanne et Annecy et Thonon. Pour une simple raison. L'explosion démographique. Et accessoirement l'envie d'urbanité.

 

Visions politiques et réalités quotidiennes

Le constat géographique ci-dessus implique de facto une vision politique à moyen et long terme. En attendant il va falloir gérer nos divergences. Culturelles, historiques, économiques. Nos élus y travaillent. Mais ils tombent vite dans le travers de se projeter dans un monde idéal sans tenir compte des réticences de la population exacerbant d'autant l'impression de décalage entre leurs projets et les souhaits de ceux qui les ont élus.

Un élu doit avoir une vision et un cap, mais il ne doit pas perdre de vue les réalités et les attentes du moment. A défaut, soit il sera sanctionné dans les urnes, soit il n'atteindra pas la cible faute d'avoir passé les étapes indispensables que sont les consultations, la communication et le rassemblement pour l'obtention d'un consensus. C'est certainement frustrant pour celui qui voit plus loin, mais c'est un chemin incontournable. Il faut de la patience.

Le serpent de mer de la traversée de la rade est un bon exemple de mauvaise gestion par le Conseil d'Etat. Non seulement il n'a pas su fonctionner collégialement, mais il n'a pas anticipé les conséquences d'un vote de principe dont les contours n'étaient pas définis. Accepter le principe d'une traversée à plus de 65 % n'a pas suffit lorsqu'il a fallut choisir entre un pont et un tunnel. Et le temps qui s'est écoulé entre les deux votations a propulsé le canton dans une réalité économique si différente que le financement n'était plus envisageable sans une augmentation de l'impôt sur les véhicules à moteur. Une telle médiocrité dans la réactivité fut fatale.

La velléité actuelle des Verts, et de la gauche en général, de vouloir décourager le transport individuel motorisé (TIM) est un autre exemple de décalage. La voiture telle que nous la connaissons aujourd'hui, est non seulement incontournable, mais elle va continuer à se développer de manière conséquente. Il suffit de voir l'engouement pour le Salon de l'Auto pour s'en persuader.

La raison ne se situe pas seulement au niveau de l'aspiration personnelle à se distinguer par cet élément valorisant, mais c'est un besoin vital. La mobilité est au centre de l'économie. Sans elle, c'est la paralysie. Il s'agit donc de garder une vision de centres urbains débarrassés de l'engeance que constituent ces véhicules bruyants et polluants, mais pas avant d'avoir offert au public des alternatives attractives et crédibles. Les deux traversées du lac, rade et lac, ainsi que la démocratisation de l'utilisation des taxis et autres transports professionnels de personnes (transport handicap, vélo-taxi, limousines et navettes hôtelières pour ne nommer que ces modes) sont déjà des pistes à suivre. Je développe plus largemenent ces idées dans mes textes liés à la mobilité. (Tag : mobilité)

 

Brimades et autres particularismes culturels

Les exemples ne manquent pas pour illustrer nos divergences. Le Genevois français devient un dortoir pour Genève et l'activité économique est centralisée. S'il est clair que nos voisins sont tributaires de décisions qui se prennent à Paris, les communes françaises disposent de prérogatives importantes qui permettent des accords locaux non négligeables.

La construction récente d'un centre médical d'importance à Annemasse peut être perçu de deux manières différentes. D'un côté on peut louer la volonté de développer le tissu économique de la région en évitant ainsi des déplacements inutiles, mais d'un autre on peut s'interroger sur les raisons qui motivent un tel choix lorsqu'on connait la surcapacité de l'offre genevoise. De même dans la gestion des déchêts. Comment comprendre la velléité de Bellegarde de créer un centre d'incinération qui implique presque la fermeture d'un four à Verbois pour surcapacité ?

La région doit encore être inventée. Elle n'existe que dans la tête de quelques élus ou autres visionnaires.

Les taxis, dommaine que je connais particulièrement bien, sont aussi très représentatifs du niveau médiocre de collaboration trans-frontalière. Saviez-vous que les taxis suisses sont obligés de passer par la douane de Bardonnex pour emmener un client en France voisine ? Quelle que soit sa destination ! Et ceci pour la simple raison que les taxis suisses doivent s'aquitter de la TVA pour l'utilisation des routes françaises alors que l'inverse n'est pas de mise.  Il ne faut pas s'étonner dès lors que les mentalités peinent à évoluer. Au contraire, par ces brimades incompréhensibles, on durcit les fronts et le sentiment nationaliste s'exacerbe. Dommage.